10 exploits majeurs qui ont marqué l’escalade en 2025 : records, flashs et premières mondiale
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Dernière mise à jour : il y a 15 heures
2025 n’a pas été une année d’exploits isolés : elle a été le théâtre d’une accumulation de performances extraordinaires qui redéfinissent les limites de l’escalade.
De Brooke Raboutou et son historique 9b+ à Hamish McArthur et son 9A en une seule séance, en passant par des flashs inédits comme celui de Janja Garnbret et un potentiel 9A+ bloc pour Elias Iagnemma , la scène internationale a vu des grimpeuses et grimpeurs repousser le possible dans tous les styles — falaise, bloc, trad et vitesse.
Au-delà des cotations ou des records, ce qui frappe cette année, c’est la diversité des approches : projets de longue haleine, préparation minutieuse, prises de risques assumées, maîtrise technique et engagement mental intense.
Loin de l’image spectaculaire parfois associée au très haut niveau, ces performances racontent surtout un sport devenu plus exigeant que jamais, où chaque mouvement, chaque décision peut faire la différence.
1- Brooke Raboutou – Excalibur (9b+)
Avec l’enchaînement d’Excalibur à Arco, Brooke Raboutou devient la première femme à valider une voie cotée 9b+. Le fait est simple, mais son poids est considérable. À ce jour, seules trois voies plus dures existent officiellement dans le monde, toutes cotées 9c:
« Silence » , « DNA » , « B.I.G. ». Excalibur se situe donc à la frontière actuelle du possible en escalade sportive.
Ouverte en 2023 par Stefano Ghisolfi, cette ligne courte et très déversante concentre une intensité rare, où l’erreur n’est pratiquement pas permise. Will Bosi, premier répétiteur, avait confirmé une cotation sévère, et malgré l’intérêt de nombreux grimpeurs de tout premier plan, la voie avait jusque-là résisté à toutes les autres tentatives.
Raboutou aborde ce projet avec un bagage construit depuis longtemps, entre une carrière internationale en compétition et une progression constante en falaise. Son enchaînement ne repose ni sur un coup d’éclat ni sur une prise de risque démesurée, mais sur une lecture précise de la voie et une exécution maîtrisée, du premier au dernier mouvement. Ce 9b+ ne marque pas seulement une nouvelle étape pour elle, il vient surtout confirmer que l’écart au sommet du très haut niveau féminin continue de se réduire de manière tangible.

2- Elias Iagnemma – Exodia (proposition 9A+ bloc)
Avec Exodia, réalisé dans le Val Pellice, Elias Iagnemma propose ce qui pourrait devenir le premier 9A+ bloc de l’histoire. Derrière cette cotation potentielle se cache un projet d’une ampleur rare : plus de quatre ans de travail, plus de 200 séances, et une implication constante.
Le bloc, extrêmement physique et morphologique, repousse les limites actuelles du possible en termes de force et de coordination. Que la cotation soit confirmée ou non à l’avenir, Exodia s’impose déjà comme l’un des projets les plus sérieux jamais menés en bloc, tant par son intensité que par la persévérance nécessaire pour l’aboutir.
Cette réalisation place Iagnemma parmi les acteurs majeurs du très haut niveau mondial, et ouvre un nouveau débat sur la frontière réelle des cotations extrêmes en bloc.

3- Oriane Bertone – N°1 mondiale en bloc
En 2025, Oriane Bertone a remporté le classement général de la Coupe du monde de bloc, devenant la première Française à accomplir cet exploit depuis 2007. Sa saison se distingue par une régularité remarquable, avec cinq finales sur six étapes et plusieurs podiums.
Dans un circuit de plus en plus dense et imprévisible, cette constance témoigne d’une maturité sportive affirmée. À seulement 20 ans, Bertone s’impose déjà comme l’une des figures centrales du bloc mondial, capable de performer sur l’ensemble d’une saison, et pas uniquement sur des coups d’éclat isolés.

4- Katie Lamb – The Dark Side (8C+)
Avec l’ascension de The Dark Side au Yosemite, Katie Lamb devient la première femme à enchaîner un bloc coté 8C+ reconnu sans contestation. L’information est claire, mais son importance est majeure, tant ce niveau reste extrêmement restreint.
Situé au cœur de l’histoire du bloc américain, The Dark Side a été ouvert par Carlo Traversi après plusieurs années de travail, puis répété et confirmé par Aidan Roberts. La ligne combine des mouvements très compressifs, une gestuelle complexe et une exigence physique constante, sans section réellement permissive.
Cette ascension revêt une dimension particulière pour Lamb, dont un précédent 8C+ — Box Therapy — avait été décoté après répétitions.
Ici, aucun débat ne subsiste. The Dark Side s’impose comme un jalon clair dans l’évolution du bloc féminin, et confirme que les grimpeuses s’installent désormais durablement dans les cotations les plus élevées, sans zone grise ni discussion de légitimité.

5- Adam Ondra – Lexicon (E11) et Greenspit (8b+ trad), flashs historiques
En 2025, Adam Ondra a une nouvelle fois repoussé les limites de l'escalade et cette fois en trad avec deux flashs majeurs, réalisés sur des lignes parmi les plus emblématiques et engagées d’Europe. Le premier concerne Lexicon (E11), dans le Lake District, une voie réputée autant pour sa difficulté que pour son engagement extrême.
Ouverte par Neil Gresham, Lexicon comporte un crux final où une chute de plus de vingt mètres reste possible malgré les protections. La flasher implique non seulement une maîtrise technique irréprochable, mais aussi une capacité rare à accepter l’exposition et le risque dès le premier essai. Ondra devient ainsi le premier grimpeur non britannique à réussir la voie, et signe l’un des flashs les plus sérieux jamais réalisés en trad.
Quelques semaines plus tard, il ajoute à cette liste le flash de Greenspit (8b+ trad) dans le Valle dell’Orco. Cette fissure horizontale, libérée en pur style trad au milieu des années 2000, est devenue une référence absolue en escalade de fissure européenne. En la flashant, Ondra démontre une fois de plus une polyvalence hors norme, capable de s’exprimer aussi bien dans la difficulté sportive extrême que dans l’engagement et la technicité du trad.

6- Janja Garnbret – Pure Dreaming (8c+/9a) flash
Quelques jours à peine après sa victoire au Rock Master KO Boulder à Arco, Janja Garnbret a troqué le mur de compétition pour les falaises de Massone et a signé un moment historique : elle a flashé Pure Dreaming, une ligne mythique ouverte par Alfredo Webber et libérée en 2018 par Adam Ondra.
Sans utiliser les repos habituels et malgré une prise récemment cassée, Janja a déroulé avec une précision et une fluidité exceptionnelles. Certains observateurs estiment qu’il pourrait s’agir du premier 9a flashé par une femme, un exploit qui redéfinit les limites de l’escalade féminine.
À titre de comparaison et pour souligner le niveau mondial, Laura Rogora a également signé une performance à vue remarquable cette année, en réussissant une voie cotée 8c+. Ces performances démontrent que la maîtrise du geste et la lecture de voie peuvent désormais rivaliser avec la force brute et l’expérience.

7- Veronica Chik – Fish Eye (8c) à 9 ans
À Oliana, la jeune grimpeuse chinoise Veronica Chik a marqué l’année en devenant la plus jeune personne de l’histoire à enchaîner une voie cotée 8c, avec Fish Eye.
À seulement neuf ans, elle valide une ligne longue, soutenue et exigeante, réputée pour son endurance et sa continuité.
Ouverte par Chris Sharma, Fish Eye développe près de 50 mètres sur un mur déversant, sans réelle section de récupération. La difficulté ne réside pas uniquement dans les mouvements, mais dans la capacité à gérer l’effort, le rythme et la concentration sur toute la longueur.
Si cette performance impressionne par son niveau pur, elle interpelle également par la précocité de l’athlète. Sans extrapolation excessive, le fait est là : jamais un grimpeur aussi jeune n’avait atteint un tel degré de difficulté en falaise, plaçant Veronica Chik dans une catégorie totalement inédite de l’histoire de l’escalade.

8- Yannick Flohé – Foundation’s Edge (8C) flash
À Fionnay, en Suisse, Yannick Flohé a réalisé un exploit inédit en devenant le premier grimpeur à flasher un bloc coté 8C, avec Foundation’s Edge. Ouverte par Dave Graham, cette ligne fait partie des références absolues du bloc moderne et a été répétée par de nombreux grimpeurs de premier plan, sans jamais voir sa cotation remise en cause.
Flasher un tel bloc implique de réussir, dès le premier essai, une succession de mouvements complexes et extrêmement exigeants, sans possibilité d’ajustement ou d’apprentissage progressif. Même si certains estiment la ligne légèrement « favorable » pour le niveau 8C, aucun précédent n’avait permis de franchir ce cap dans ce style.
Cette performance marque une avancée nette dans l’évolution du flash en bloc, et redéfinit ce qui est désormais considéré comme possible à très haut niveau.
Quelques semaines plus tard, l’histoire continue de s’écrire : le jeune grimpeur français Jules Marchaland a réalisé le même exploit à Magic Wood, en flashant Power of Now Direct (8C), l’une des lignes de bloc les plus mythiques au monde. Avec cette ascension, Marchaland devient le deuxième grimpeur au monde à réussir un 8C en flash.
À 24 ans, il combine performances en compétition et outdoor, allant jusqu’au 9B en falaise et au 8C en bloc.

9- Sasha DiGiulian – Platinum Wall, El Capitan
Au Yosemite, Sasha DiGiulian est devenue la première femme à libérer intégralement la Platinum Wall, la plus longue voie d’El Capitan. Avec ses 39 longueurs et près de 900 mètres de paroi, cette ligne représente un engagement considérable, tant sur le plan physique que logistique et mental.
L’ascension s’est étalée sur plusieurs saisons, avec de longues périodes passées en paroi, parfois dans des conditions météorologiques très difficiles. Plus qu’une question de difficulté ponctuelle, la Platinum Wall exige une capacité à durer, à gérer la fatigue et à maintenir un niveau de précision élevé sur plusieurs semaines.
Cette réalisation s’inscrit dans la continuité des grandes ascensions en big wall, et marque une étape importante dans la place des femmes sur les lignes les plus engagées de Yosemite.

10- Vitesse – Samuel Watson et Aleksandra Miroslaw
Sur le mur de vitesse, l’année 2025 a été marquée par deux records du monde.
À Bali, l’Américain Samuel Watson a porté la marque masculine à 4’’64, améliorant à deux reprises le record lors de la même compétition. À seulement 19 ans, il confirme une domination croissante sur la discipline.
Chez les femmes, la Polonaise Aleksandra Miroslaw a abaissé son propre record du monde à 6’’03 lors des Championnats du monde, se rapprochant encore un peu plus de la barrière symbolique des six secondes. Ces performances montrent que, malgré un format standardisé, la vitesse continue d’évoluer à un rythme soutenu.

Bonus- Hamish McArthur – 9A en une séance
Enfin, Hamish McArthur a marqué les esprits en réalisant No One Mourns The Wicked (9A) en une seule séance.
Deux semaines après avoir répété Megatron (9A), il valide ce bloc extrêmement exigeant sans étaler les essais sur plusieurs jours.
À ce niveau de difficulté, où chaque mouvement compte, réussir un 9A en une session constitue une performance unique. Elle confirme l’émergence d’une nouvelle génération capable d’enchaîner très vite des blocs parmi les plus durs jamais ouverts.

2025, une année charnière
Pris isolément, chacun de ces exploits pourrait déjà suffire à marquer une saison. Mis bout à bout, ils dessinent une réalité plus large : l’escalade de très haut niveau a franchi un cap structurel. Les cotations extrêmes ne sont plus l’apanage d’un profil unique, ni d’un style particulier. Elles s’expriment désormais en falaise, en bloc, en trad, en vitesse, portées par des grimpeuses et des grimpeurs aux trajectoires très différentes.
Cette évolution ne repose pas sur des coups d’éclat spectaculaires, mais sur une maîtrise toujours plus fine de l’entraînement, de la récupération, de la lecture et de l’engagement. Elle interroge aussi la suite : si ces performances deviennent possibles aujourd’hui, que restera-t-il comme frontière dans cinq ou dix ans ?
Une chose est certaine : 2025 ne restera pas comme une année record de plus, mais comme un moment où l’échelle elle-même a commencé à changer.
✍️: Théo de GrimpActu














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