Le 28 septembre 2024, Seb Bouin et Alain Robert ont réalisé une ascension audacieuse de la Tour Total à La Défense, à Paris. Cet exploit, bien qu'impressionnant, a suscité un vif débat dans les médias et parmi le public, entraînant une certaine polémique autour de leur initiative. Face à ces réactions et à l'incompréhension, Seb Bouin a décidé de partager un communiqué de presse afin de clarifier ses motivations, de réaffirmer sa passion pour l'escalade, et de dissiper les ambiguïtés entourant cet événement.
Dans ce communiqué, il explique ses intentions, les raisons de cette rencontre avec Alain Robert, et souligne l'absence de volonté de promouvoir une marque ou de s'engager dans une démarche politique. Découvrez ci-dessous l'intégralité de son communiqué, où il aborde les enjeux de cette ascension unique et sa vision de l'escalade.
Pourquoi cette ascension sur la Tour Total avec Alain Robert ?
"Ma volonté était, avant tout, de rencontrer Alain et de vivre une aventure inspirante, un moment fort avec une personne qui a marqué l’histoire de la grimpe. J’ai découvert Alain à travers ses ascensions dans le monde entier, et cette audace qu’il le caractérise.
Depuis le début du Vintage Rock Tour, mon envie est de partager l’histoire des pionniers, de ceux qui ont marqué notre sport d’une manière ou d’une autre. J’ai trouvé en Alain un personnage hors du commun, avec une philosophie qui peut parfois dérouter, mais qui reste fascinante. Le but n’était pas de promouvoir Total ni
de cautionner une marque en particulier, et encore moins de me positionner politiquement ou écologiquement. Ma démarche est celle d’un passionné d’escalade curieux cherchant à repousser mes propres limites. Ce personnage m’intriguait personnellement depuis longtemps. Je me demandais (moi aussi) pourquoi ?
Quel est son monde ? Il avait l’air si atypique. J’avais vraiment envie de découvrir son univers et pourquoi pas, vivre une expérience avec lui.
J’ai approché Alain dans mon esprit du Vintage Rock Tour : aller à la rencontre d’un personnage qui a façonné notre histoire de la grimpe. Un personnage qui a ouvert des portes, qui a laissé sa trace. J’avais dans l’idée de faire un petit documentaire vidéo avec lui, comme celles réalisées pour le Vintage Rock Tour.
Je l’ai donc appelé il y a un bon moment (plus de 1 an) en lui proposant que l’on se rencontre et pourquoi pas, s’il avait quelque chose de facile sous le coude, faire une petite randonné vertical pour papoter. Il faut bien comprendre que je ne fais pas de solo, et que je ne veux en aucun cas me mettre en danger avec ça. Donc cette idée de partager une ascension n’était pas acquise. Avant l’ascension j’ai répété plus d’une dizaine de fois à Alain que je n’étais pas sûr de m’engager dans la
tour. Je voulais tester les premiers mètres, et voir comment c’était. Si je n’était pas certain de moi, je ferai demi tour (et cela aurait aussi été un très bon sujet pour le documentaire, pour expliquer la démarche mentale).
Avant l’ascension j’étais à 50/50, soit une chance sur deux, de ne pas y aller. Je me laissais vraiment le droit de faire demi tour. Mon idée était de rencontrer Alain et son monde, pas de m’exposer personnellement. L’objectif aurait été atteint même si je n’avais pas pris le départ. A moins de 99% de chance de réussite, je n’y serai jamais allé. Ainsi après les premiers mètres ma certitude de ne pas tomber était quasiment totale. Peut être même plus que de ne pas avoir d’accident avec sa voiture lorsqu’on prend la route. Il faut bien rappeler que je grimpe à haut niveau depuis plus de 10 ans et que ma maitrise physique et mentale de l’activité me permettent de jauger cela.
Ce qu’il faut bien comprendre dans cela, c’est que cette ascension était préméditée pour Alain, mais moi je n’était absolument pas sur d’y aller.
Ainsi, j’étais assez loin de me douter des répercussions médiatique que pouvait avoir un tel acte."
Réactions et incompréhensions :
Après l'ascension, les réactions médiatiques ont été vives, certains interprétant l'exploit comme un acte de promotion pour Total, voire un geste politique. Seb Bouin s’excuse pour la confusion créée par les images, qui montraient le logo de Total en arrière-plan
"L’objectif de cette aventure n’a jamais été de promouvoir une marque, de cautionner un groupe industriel ou de défendre une cause autre que celle du partage et du dépassement personnel. Je comprends que certaines personnes aient pu interpréter cela autrement, et je suis désolé que des images aient pu induire en erreur.
Alain et moi avons toujours souhaité partager notre passion pour l’escalade dans un acte de maîtrise et de concentration extrême. Nos valeurs sont avant tout humaines et sportives. Jamais il n’a été question de faire de cette aventure un acte de communication ou de publicité pour Total, et encore moins d’associer la grimpe
à une cause qui nous dépasserait.
Cependant, post ascension, tout est allé très vite. Pour moi, je venais de faire un exploit personnel. J’avais réussis à contrôler mes émotions, à me raisonner de manière logique face à une peur plus subjective qu’objective. L’exprimer et communiquer via des images faisait sens. Je parlais d’escalade et non d’écologie où de politique.
Jan Virt a traité les photos dans la foulée et m’a envoyé un carrousel pour communiquer.
J’ai communiquer tout de suite sans prendre le temps de me poser. L’excitation d’avoir réussis cette grimpe à pris le pas sur la réflexion. Cela a été une erreur car je n’ai pas pris le temps de penser à ce que pourrait représenter ce solo. Pour moi il s’arrêtait à une expérience cool avec Alain, et un dépassement personnel en escalade. Cependant, mon erreur aura été de ne pas trier d’avantage les images de Jan Virt, et d’enlever les images avec le logo Total.
Il y a notamment une image paysage postée en double page qui a mal été interprété par certains.. Celle ci peut laisser penser que l’on a fait une pleine page du logo Total. Ce qui n’est pas le cas car l’image était en paysage et à voir en entier quand en switch à droite (image ci dessous). Ni Jan Virt, n’y Alain, ni moi avons pensé que ce lien entre Total et notre exploit pouvait être fait. Il faut rappeler qu’il s’agit d’une ascension illégale. Et je ne vois vraiment pas comment Total pourrait cautionner cela ?"
Un solo pour le dépassement personnel, pas pour le buzz
En réponse aux accusations selon lesquelles cet exploit aurait été réalisé pour faire le buzz, Bouin est catégorique :
"Il faut être stable dans sa tête et heureux de se lancer dans un tel défie / challenge personnel. Se lancer la dedans pour faire le buzz est la pire des motivation que l’on puisse avoir pour un premier solo. S’écouter passe par écouter sa motivation. Si elle vient de l’extérieur, et qu’à l’intérieur de nous on ne le sent
pas, il ne faut surtout pas y aller. C’est vraiment le meilleur moyen de se traumatiser et d’aller au casse pipe. Faire un solo pour les mauvaises raisons, je pense que ça peut nous marquer à vie... Même si on ne tombe pas.
La question écologique : une sensibilité personnelle
Concernant les critiques sur son manque de prise de position face aux enjeux écologiques, Bouin réaffirme ses convictions tout en expliquant son choix de ne pas politiser cette aventure.
« J'ai toujours considéré que l'écologie et la politique sont des sujets avant tout personnels, et que chacun doit pouvoir agir selon ses propres convictions. Faire de la sensibilisation est une chose, mais afficher mes opinions personnelles dans un cadre professionnel en est une autre. Cependant, je comprends les remarques et j'apprécie d'échanger sur le sujet. Pour clarifier, je tiens à affirmer que je suis fermement opposé aux valeurs et pratiques de Total dans notre monde. Cette question me touche profondément, je m’exprimerai davantage sur ce sujet sur mes réseaux. Ayant été élevé dans une ferme avec un focus sur notre manière de vivre, je pense avoir une conscience de l’environnement et de la vie qui m’entoure. Et pour moi, c’est un coup dur d’être associé à cela. Il me semble invraisemblable de pouvoir penser une minute que l’on est un accord avec Total sur la promotion via un solo illégal. Par solo illégal il faut bien entendre deux choses : risque de mourir (donc pas très bonne pub tout de même) et risque de chopper une amende colossale (pour Total) pour avoir prémédité un acte illégal (pas très bonne pub non plus). Et s’il n’y a pas d’accord avec Total, alors nous aurions fait de la pub gratuite ? Comme ça ? Pour le plus grand dévastateur écologique de notre temps ?"
💬 : Seb Bouin
📝 : GrimpActu.
📷 : Janvirtphotography