La respiration, qui se manifeste au repos entre 12 et 20 fois par minute, sans que nous y prêtions vraiment attention au quotidien, permet de manière permanente et automatique l'oxygénation de l’organisme et l’élimination du dioxyde de carbone.
Pendant une activité physique, la fréquence respiratoire passe à 40/60 fois par minute et fournit l’énergie nécessaire au fonctionnement de toutes les cellules de notre corps.Par ce simple cycle d’inspiration et d’expiration, notre corps s’adapte en permanence à l’environnement qui l’entoure, en stimulant selon ses besoins les différentes branches de notre système nerveux central.
Longtemps négligée dans les routines d’entraînement en escalade, la respiration est aujourd’hui reconnue comme un facteur clé, autant pour optimiser les performances des grimpeurs professionnels que pour une pratique généralisée. Elle constitue un outil incontournable pour développer calme, concentration, mais aussi stimulation et récupération.
La respiration a des effets puissants sur notre métabolisme, qui peuvent parfois conduire à une perte de contrôle émotionnel et physique .Les amygdales, structures cérébrales impliquées dans les émotions, s’activent lors de l’exposition à un stimulus stressant. Par l’intermédiaire de l’inspiration, elles peuvent déclencher les fonctions de fuite ou de combat en activant le système nerveux sympathique. À l’inverse, une expiration prolongée stimule le système parasympathique, favorisant ainsi les fonctions de repos, de production hormonale et de digestion, ce qui procure calme et apaisement.
Sur cette base théorique, comment utiliser sa respiration pour en faire un outil d’activation ou d’apaisement du cerveau et de l’organisme ?
En prolongeant cette réflexion, il est possible d’en faire un vecteur de progression en escalade, quel que soit le niveau de pratique. Lors d’un effort physique, la fréquence respiratoire augmente pour fournir l’énergie nécessaire à vos muscles. En escalade, où la tension mentale est aussi importante que l’effort physique, la respiration joue un rôle double :
Apaisement : Une respiration lente et contrôlée active le système parasympathique, responsable du repos et de l’apaisement.
Activation : Une respiration rapide et intense stimule le système sympathique, déclenchant une montée d’adrénaline.
Ce double rôle fait de la respiration un outil flexible, capable de répondre à vos besoins en temps réel, que ce soit pour gérer une montée d’anxiété ou pour vous engager dans un passage exigeant.
Une routine respiratoire pour mettre à distance le stress et trouver le flow
En complément de l’échauffement corporel, vous pouvez début de séance faire un échauffement respiratoire et mental systématique. Cela permet, grâce à la respiration, de se mettre dans une routine concentrative optimale. Ce processus peut être combiné à la visualisation positive pour optimiser les objectifs de la séance et l’aborder avec sérénité et confiance.
La respiration abdominale est la base d’une respiration efficiente et active. Elle engage le diaphragme dans le processus respiratoire, souvent bloqué dans une respiration haute. Lorsqu’elle est mise en place, la respiration abdominale permet une respiration complète : elle favorise une oxygénation optimale (aérobie) et améliore l’efficacité des structures corporelles (musculaires, organiques, tissulaires) et mentales.
Exercice :
Placez une main sur le ventre, l’autre dans le bas du dos. Laissez l’abdomen se gonfler à l’inspiration.
Stimulez la rétractation à l’expiration en pressant les deux mains.
Observez ensuite la naissance du mouvement respiratoire au niveau de l’abdomen, puis ressentez-le dans le thorax et même dans le dos : c’est un cycle de respiration complète.
La cohérence cardiaque pratiquée pendant 5 minutes avant l’échauffement, sur une base de 4 secondes d’inspiration et 6 secondes d’expiration (6 cycles respiratoires par minute), permet d’harmoniser la variabilité cardiaque. Avec une bouche pincée, cet exercice équilibre le fonctionnement des poumons, du cœur et du cerveau. Cela vous met dans des conditions idéales de concentration, avec une acuité mentale accrue et un apaisement physique : promesse de flow au rendez-vous !
Exercice :
Avant de commencer une séance, pratiquez pendant 5 minutes une respiration rythmée :
Inspirez par le nez pendant 4 secondes.
Expirez par la bouche pendant 6 secondes.
Répétez ce cycle, en vous concentrant sur le mouvement de votre diaphragme.
Résultat : une réduction immédiate du stress, un rythme cardiaque harmonisé, et une meilleure concentration pour aborder la grimpe en toute sérénité.
La respiration pour l’activation du corps et du mental
De la même manière qu’une respiration régulière favorisant l’expiration peut induire calme et apaisement, une activation du système nerveux sympathique avant le départ dans une voie, ou avant de s’engager dans un passage clé, peut être un allié de taille.
Exercice :
Inspirez puissamment par le nez.
Expirez fortement par la bouche.
Ce flux d’oxygène intense vers le cerveau déclenche une montée d’adrénaline, préparant le mental et le corps au mode « combat » pour aborder des sections exigeantes.
La rétention d’air (ou même l’émission de sons) peut aussi être utile dans des actions ponctuelles nécessitant une grande dépense énergétique.
Exercice :
Après avoir soufflé pour vider l’air des poumons, inspirez et retenez l’air poumons pleins tout en tendant toutes les structures musculaires.
Identifiez les tensions physiques et mentales, puis expulsez l’air en relâchant simultanément le corps.
Récupérez avec quelques cycles respiratoires en accentuant l’expiration, et c’est parti !
Dans un de ses récents posts, le légendaire grimpeur Antoine Le Menestrel partageait: « Oui, l’inspiration ne me donne pas d’énergie dans le mouvement, elle ressource. L’apnée est un "joker" pour un mouvement très tonique ou explosif, elle ne dure pas longtemps. L’expiration, c’est la détente, la concentration, l’allongement, la durée. »
Respiration, décontraction musculaire au repos et récupération
L’optimisation de l’expiration prend tout son sens lors des phases de repos. Un véritable repos, en pleine voie, permet d’évacuer l’acide lactique accumulé, de régénérer l’organisme et de restaurer les fonctions vitales et musculaires.
Le souffle, trait d’union entre le corps et l’esprit, rééquilibre les forces en présence. Avec de l’entraînement, cette technique permet une décontraction quasi instantanée lors des phases de repos, tout en mobilisant le potentiel mental pour réussir son projet (grâce à un mot ou un geste signal).
De plus, dans un contexte de récupération après une séance ou de reprise de l’escalade après une blessure, associer respiration et visualisation positive accélère la régénération des structures endommagées et prépare le retour à l’effort en pleine conscience de son schéma corporel.
L'activation ou l'apaisement peuvent être utilisés à plusieurs moments de votre pratique : avant, pendant, ou après. Il suffit simplement de savoir pourquoi vous le faites et quelle intention vous y mettez.
Ainsi, la respiration constitue un outil puissant pour améliorer sa progression en escalade. Pour aller plus loin, nous verrons dans un second temps comment associer ce travail à une prise de conscience fine du schéma corporel et à l’utilisation de la visualisation positive, aujourd’hui largement adoptée par les athlètes de la verticalité.
📝 : Armelle Bouret : Sophrologue et sportive outdoor
🗞️ : GrimpActu.